Rapport sommaire : Consultations publiques auprès de communautés ethnoculturelles et religieuses au sujet de l'impact de la Loi antiterroriste

29 novembre 2004
Ottawa, Ontario


Le présent document est un résumé des opinions exprimées par les participants, et il ne représente pas les opinions du ministère de la Justice ou du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile du Canada.


Introduction

L'animateur, Mark Berlin, directeur exécutif national, Liaison et partenariats, ministère de la Justice, a souhaité la bienvenue aux participants à la consultation et a présenté le procureur général du Canada et ministre de la Justice du Canada, l'honorable Irwin Cotler.

Le ministre Cotler a présenté les principes et les perspectives qui encadrent et sous-tendent la discussion au sujet de la Loi antiterroriste. La sécurité et les droits composent les deux volets de l'approche à l'égard du terrorisme et des droits de la personne, laquelle approche est ancrée dans six principes fondamentaux.

Le premier porte sur la protection, c'est-à-dire que la Loi antiterroriste doit être considérée comme protégeant la sécurité d'un pays démocratique comme le Canada et les droits fondamentaux de ses habitants contre la menace terroriste transnationale, et le second principe, sur la retenue, c'est-à-dire, que l'application des lois contre le terrorisme doit toujours respecter la primauté du droit; que les personnes et les groupes ne devraient jamais faire l'objet d'un traitement différentiel et discriminatoire; que la torture doit être interdite partout et à jamais; et que nous ne devons pas faire de compromis au sujet de nos valeurs touchant la protection de notre sécurité.

Le troisième principe se fonde sur la Charte canadienne des droits et libertés et la ,« Révolution constitutionnelle », c'est-à-dire que l'application et la mise en œuvre de la Loi anterroriste doivent toujours respecter la Charte.

Le quatrième principe, celui des droits des minorités, développé et confirmé par les tribunaux canadiens en tant que pilier de la Constitution et non sans rapport avec un principe fondamental du programme en matière de justice, établit que pour savoir si une société est juste, il faut vérifier comment elle traite ses membres les plus vulnérables : les enfants, les femmes, les Autochtones, les malades, les aînés et les minorités.

Le cinquième principe est contextuel : il exige que nous examinions notre droit pénal dans son contexte, notamment le changement du contexte transnational de la menace et l'émergence d'un modèle de justice pénale internationale. Le Ministre a expliqué que nous n'avons pas affaire à une simple violence criminelle dans un contexte interne, mais bien à des crimes contre l'humanité; que nous n'avons pas affaire seulement à des criminels ordinaires, mais à des ennemis du genre humain. Il a poursuivi en indiquant qu'il importe de reconnaître que des pays comme l'Indonésie, qui est à la fois le pays musulman le plus peuplé et la démocratie musulmane la plus peuplée au monde, a classé la lutte antiterroriste au rang de ses priorités.

Le Ministre a présenté un dernier principe, soit le principe de la surveillance. Il a donné des exemples de mécanismes de contrôle, tels les examens parlementaires, la surveillance parlementaire permanente, le contrôle judiciaire, la Table ronde transculturelle sur la sécurité, le dialogue permanent et les consultations comme celle-ci, de même que les rôles respectifs des groupes de défense des droits de la personne et des médias.

Les deux dispositions importantes de temporarisation de la Loi antiterroriste - l'arrestation à titre préventif et les audiences d'investigation - constituent un autre aspect de la surveillance, selon le Ministre. Celui-ci a mentionné que sa proposition initiale de mesure de temporarisation applicable à l'ensemble de la Loi avait été remplacée par des dispositions de temporarisation visant deux de ses dispositions. Le Ministre a conclu ses commentaires sur le principe de la surveillance en affirmant qu'il attachait la plus grande importance à ce qu'il a décrit comme la « démocratie rayonnante », qui se manifeste lorsque les groupes de défense des droits de la personne, les médias, le Parlement et des particuliers tels que les participants au présent dialogue, s'engagent tous dans un processus visant à assurer l'imputabilité démocratique relativement à la Loi antiterroriste.

Le Ministre a conclu en réitérant son engagement à protéger la sécurité de la démocratie canadienne et les droits de ses habitants, tout en respectant les mesures d'application de la loi qui sont prises selon des modalités qui ne portent pas atteinte aux droits de la personne et qui assurent qu'aucun particulier ni aucun groupe ne fait l'objet d'une application discriminatoire de la loi. Il ne devrait y avoir aucune contradiction entre la sécurité et les droits de la personne. « Soit il y aura à la fois sécurité et droits de la personne, soit il n'y aura ni l'un ni l'autre », a-t-il conclu.

Ministère de la Justice : Aperçu général de la Loi antiterroriste

Mark Berlin a présenté Michael Zigayer, avocat-conseil, Section de la politique en matière de droit pénal du ministère de la Justice du Canada, et Ian Blackie, chef, Politique de la sécurité nationale, ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile du Canada.

M. Zigayer a donné un aperçu général de la Loi antiterroriste et a distribué des copies papier de sa présentation. Il a mentionné qu'un des principes directeurs de l'élaboration de la Loi antiterroriste avait été la responsabilité, pour le Canada, de s'acquitter de ses obligations internationales. Au moment où sont survenus les attentats terroristes du 11 septembre 2001, le Canada avait mis en œuvre la plupart, mais non l'ensemble, des conventions antiterroristes auxquelles il avait adhéré. Dans la foulée du 11 septembre 2001, des travaux considérables ont été entrepris pour mettre en œuvre les deux dernières conventions, soit la Convention internationale pour la répression des attaques terroristes à l'explosif et la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme et aborder d'autres questions émergentes.

M. Zigayer a expliqué la définition de l'expression « activité terroriste » énoncée au Code criminel, qui vise notamment les actes commis au nom d'un objectif politique, religieux ou idéologique en vue d'intimider la population ou de contraindre un gouvernement à accomplir un acte ou à s'en abstenir, et qui visent à causer des blessures graves à une personne ou la mort de celle-ci, à mettre en danger la vie d'une personne ou à causer des dommages matériels considérables ou à perturber gravement des services, installations ou systèmes essentiels. Il a dit que la définition était circonscrite de manière à faire en sorte que la perturbation grave de services essentiels ne soit pas définie comme une activité terroriste si elle survient à l'occasion d'une manifestation ou d'une grève de travailleurs, ou s'il n'y a pas d'intention de causer des blessures graves, de mettre en danger des vies ou de poser une menace grave à la sécurité publique.

Les dispositions législatives visent à cibler les participants directs à une activité terroriste, y compris les individus qui commettent une infraction au profit d'une organisation terroriste ou au nom d'une telle organisation. Deux outils d'enquête ont été mis à la disposition des responsables de l'application de la loi pour les aider à réaliser cet objectif. Un de ces outils est l'engagement assorti de conditions, qui consiste essentiellement à amener une personne soupçonnée d'activité terroriste devant un tribunal qui peut imposer des conditions à cette personne. Le deuxième outil est l'investigation, qui permet à un agent de la paix de demander à un juge de la cour provinciale ou à un juge d'une cour supérieure, en l'absence de toute autre partie, d'ordonner à une personne de répondre à des questions aux fins de recueillir des renseignements au sujet d'infractions en matière de terrorisme. Ces deux outils sont assujettis à un mécanisme de surveillance en ce que les procureurs généraux et les ministres provinciaux et fédéraux responsables du maintien de l'ordre et le solliciteur général ont l'obligation de présenter un rapport public au Parlement au sujet de leur utilisation.

M. Zigayer a conclu en disant que les organismes intéressés à témoigner lors de l'examen parlementaire de la Loi antiterroriste pourraient communiquer avec le greffier de ce comité, après qu'il aura été constitué.