Une estimation de l’incidence économique de la violence conjugale au Canada en 2009

1. Introduction

L’objectif du rapport est de présenter une estimation de l’incidence économique de la violence conjugale au Canada en 2009. La présente section commence par une brève analyse portant sur la nature et l’ampleur du phénomène de la violence conjugale au Canada, analyse suivie de quelques paragraphes sur le sexe et la violence conjugale, puis d’explications concernant l’utilité des estimations du coût de la criminalité. Les sections suivantes contiennent une description de la méthode utilisée pour estimer l’incidence économique de la violence conjugale et des estimations à l’égard de trois catégories : l’incidence sur le système judiciaire (pénal et civil), l’incidence sur les principales victimes et l’incidence sur des tierces parties.

1.1 La violence conjugale au Canada

La violence conjugale (VC) est un important problème de société auquel on prête beaucoup d’attention depuis une trentaine d’années en sciences sociales, dans le domaine juridique ainsi que dans les médias. La violence entre conjoints est un phénomène unique, parce que les conjoints ont une relation complexe qui suppose des liens physiques, affectifs et économiques, de nombreux cas de violence conjugale étant également compliqués par la présence d’enfants. La victime de violence conjugale est susceptible de subir des conséquences physiques, affectives et financières à long terme. Ces effets ne touchent pas que la victime; ils sont beaucoup plus profonds et peuvent aussi toucher les membres de sa famille, ses amis et son employeur. L’ensemble de la société est par ailleurs affecté, que ce soit en raison du fardeau financier supplémentaire pour le système de soins de santé ou à cause de la perte de productivité future des enfants exposés à la violence conjugale. Les gouvernements et d’autres organisations mènent une lutte constante contre la violence conjugale, et une quantité considérable de ressources qui pourraient être utilisées à d’autres fins au Canada servent à combattre ce fléau. Malgré les campagnes de sensibilisation et de prévention qui sont menées au Canada depuis des dizaines d’années, la violence conjugale demeure une réalité dévastatrice pour beaucoup de familles de tous les groupes sociaux, économiques et culturels. Les statistiques établies à l’échelle nationale montrent que, sauf pour ce qui est des homicides conjugaux, l’incidence de la violence conjugale n’a pas diminué au Canada avec le temps (voir Perreault et Brennan 2010).

La violence conjugale n’est pas une infraction aux termes du Code criminel, mais beaucoup d’actes de violence conjugale sont considérés comme étant des crimes au Canada. Parmi les infractions qu’on associe souvent à la violence conjugale, mentionnons les voies de fait simples, l’agression armée, l’agression sexuelle, l’homicide, la séquestration, les menaces, le harcèlement criminel et l’omission de remplir l’obligation de fournir les choses nécessaires à l’existence. La violence psychologique et l’exploitation financière constituent également des formes de violence conjugale (Mechanic et coll. 2008; Adams et coll. 2008), mais elles ne sont pas nécessairement considérées comme étant des crimes au Canada (Johnson et Dawson 2011). Il y a toutefois des lois provinciales et territoriales (p. ex. la Victims of Family Violence ActR.S.P.E.I. 1988, chap. V-3.2 de l’Île-du-Prince-Édouard et la Loi sur la violence familiale et le harcèlement criminel, C.P.L.M., chap. D93 du Manitoba) aux termes desquelles elles sont considérées comme étant des formes de violence. Ces lois prévoient des recours civils et complètent les dispositions du Code criminel.

Pour décrire l’ampleur du phénomène de la violence conjugale, on peut utiliser entre autres les données des services de police. En 2009, 46 918 incidents de violence conjugale ont été signalés à la police, ce qui représente 11 % des crimes violents signalés à la police au CanadaNote de bas de la page 1. Dans 81 % des cas, c’est une femme qui était la victime, ce qui montre que la violence conjugale est davantage le fait d’un sexe que de l’autreNote de bas de la page 2. La majorité (71 %) des incidents signalés à la police sont survenus entre des gens en couple, le reste des incidents (29 %) étant survenus entre des gens qui avaient déjà été ensemble. La plupart des incidents de violence entre conjoints consistaient en des infractions de faible gravité d’après la définition de Statistique Canada, les voies de fait simples comptant pour la majeure partie des infractions signalées (63 %). Les agressions armées et les voies de fait causant des lésions corporelles comptaient pour 13 % des actes de violence conjugale commis, tandis que les menaces et le harcèlement criminel étaient un peu moins courants et comptaient respectivement pour 10 % et 7 % des infractions commises. Dans les cas les plus graves, la violence conjugale peut aller jusqu’à la mort de l’un des conjoints. En 2009, il y a eu 65 homicides conjugaux au Canada, soit 11 % des homicides commis au cours de l’année. Comme c’était le cas au cours des années précédentes, les femmes étaient plus susceptibles que les hommes d’être victimes d’homicide conjugal en 2009, et près de trois fois plus de femmes que d’hommes ont été tuées par leur conjoint ou un ex-conjoint au cours de l’année. Par ailleurs, huit décès ont été causés par d’autres infractions, notamment la négligence criminelle causant la mort.

Les données fournies par les victimes elles-mêmes, qui sont une autre source de données pour l’étude de la violence conjugale, révèlent que la plupart des incidents n’ont pas été portés à l’attention des services de police. Selon l’Enquête sociale générale (ESG) de 2009, 1 186 000 Canadiens de 15 ans et plus et vivant dans une province ont déclaré avoir été victimes d’actes de violence physique ou sexuelle commis par leur conjoint au cours des cinq années précédentes. En 2009 seulement, 335 697 Canadiens ont été victimes de 942 000 incidents de violence conjugale. Moins du quart (22 %) des victimes ont déclaré que les incidents survenus au cours des cinq années précédentes avaient été portés à l’attention de la police, et cette proportion avait diminué par rapport à 2004, où elle était de 28 % (Brennan et coll. 2011). Les données de l’ESG montrent également que, parmi les victimes qui préviennent la police, bon nombre le font seulement après avoir été victimes de plusieurs incidents de violence conjugale. Par exemple, 28 % des victimes ont dit avoir été la cible de plus de dix actes de violence avant de communiquer avec les services de police. Plus des trois quarts des victimes de violence conjugale ont déclaré avoir subi des répercussions affectives en plus des blessures physiques. Selon les conclusions de l’ESG, la violence conjugale est plus susceptible de se produire entre ex-conjoints qu’entre conjoints actuels, puisque 17,8 % des gens qui n’étaient plus avec leur conjoint avaient subi des actes de violence avant ou après la séparation, alors que les gens qui étaient en couple avaient été victimes de violence dans une proportion de 3,8 %. Toujours selon les conclusions de l’ESG, les femmes continuaient de faire état de formes de violence conjugale plus graves que les hommes, malgré que le taux de victimisation soit le même lorsque tous les incidents sont inclus.

Le présent rapport contient énormément de chiffres : des statistiques nationales, des chiffres tirés d’autres études, des calculs et des estimations de nature financière. Il est important de ne pas oublier qu’il y a des gens derrière ces chiffres – des hommes et des femmes – qui ont été aux prises avec la violence conjugale. L’encadré ci-dessous présente dans les grandes lignes le profil démographique des victimes, de façon à ce que le lecteur puisse se faire une meilleure idée de l’identité de celles-ci. Toutes les données sont tirées de l’ESG de 2009, et elles concernent les victimes d’actes de violence commis par leur conjoint ou un ex-conjoint.

Encadré 1.1 : Qui sont les victimes?

Un peu plus de la moitié des victimes de violence conjugale étaient des femmes (54 %). La majorité de ces femmes étaient âgées de 25 à 44 ans (67 %). Près des trois quarts (70 %) avaient fait des études postsecondaires (24 % avaient un diplôme universitaire, 31 % avaient un diplôme collégial ou de nature technique et 15 % avaient suivi des cours à l’université ou au collège sans toutefois obtenir de diplôme). Un peu plus du dixième (12 %) avaient fréquenté l’école primaire ou n’avaient pas terminé le secondaire, et les autres (18 %) avaient un diplôme d’études secondaires.

Pour ce qui est du revenu annuel personnel (et non le revenu du ménage), 5 % des femmes n’avaient aucun revenu, 5 % avaient un revenu de plus de 100 000 $. Plus de la moitié (62 %) avaient un revenu de moins de 39 999 $. Le revenu du ménage était inférieur à 19 999 $ dans le cas de 12 % des femmes.

La majorité des femmes (80 %) vivaient en milieu urbain et étaient nées au Canada (86 %)Note de bas de la page 3. Près des trois quarts (70 %) des femmes parlaient surtout anglais, tandis que le quart (25 %) parlaient français et que 5 % ne parlaient la plupart du temps ni anglais ni français. Moins du dixième (7 %) s’occupaient d’enfants et/ou de la maison comme principale occupation, et plus de la moitié (57 %) travaillaient ou cherchaient un emploi. Moins du quart (28 %) faisaient du bénévolat ou s’occupaient d’enfants qui n’étaient pas les leurs.

Moins de la moitié (46 %) des victimes de violence conjugale étaient des hommes. La majorité des hommes étaient âgés de 25 à 44 ans (58 %), et 23 % étaient âgés de 45 à 54 ans. Près des quatre cinquièmes (79 %) avaient fait des études postsecondaires, 16 % avaient un diplôme d’études secondaires, et 5 % avaient fréquenté l’école primaire ou n’avaient pas terminé leurs études secondaires. Pour ce qui est du revenu annuel personnel, le cinquième (20 %) gagnaient plus de 100 000 $, plus de la moitié (61 %) gagnaient de 20 000 $ à 69 000 $, 7 % gagnaient 19 999 $ ou moins, et aucun n’a déclaré n’avoir touché aucun revenu.

Quatre-vingt-sept pour cent des hommes vivaient en milieu urbain, et 85 % étaient nés au Canada. Pour ce qui est de la principale langue parlée, 71 % des hommes parlaient anglais, 24 % parlaient français, 1 % parlaient les deux langues, et 4 % ne parlaient la plupart du temps ni anglais ni français. Au chapitre de l’occupation principale, 71 % des hommes travaillaient ou cherchaient un emploi, 3 % avaient fait des études, 2 % s’occupaient d’enfants ou de la maison, et 18 % faisaient du bénévolat ou s’occupaient d’enfants qui n’étaient pas les leurs.

L’ESG permet de recueillir des données quantitatives et de brosser à l’aide de celles-ci une espèce de tableau de la prévalence et de la nature de la violence conjugale au Canada. Lorsqu’il prendra connaissance des chiffres des pages qui suivent, le lecteur devrait garder en tête que ces chiffres concernent des personnes bien réelles.

1.2 La mesure de la violence conjugale

Johnson et Dawson (2011, p. 65) font remarquer que la fréquence, la gravité, les conséquences et le contexte de la violence entre partenaires intimes sont propres au sexe et que la victimisation est vécue de façon distincte par les hommes et par les femmes. Il est toutefois difficile d’établir avec certitude les véritables différences entre les taux de victimisation et les expériences vécues par les deux sexes, et il n’y a pas de consensus dans le milieu de la recherche universitaire à l’égard de la façon dont la violence conjugale se répartit véritablement. Certaines études ont montré que les femmes sont plus souvent victimes de violence conjugale et qu’elles sont victimes d’actes de violence plus graves que les hommes (AuCoin 2005; Tjaden et Thoennes 2000). D’autres montrent que la fréquence est plus importante chez les femmes et que celles-ci subissent davantage de préjudices que les hommes, mais que les préjudices subis par les hommes sont plus importants (Felson et Cares 2005). Il y a aussi des travaux de recherche qui montrent que la fréquence est la même chez les femmes et les hommes, mais que les femmes vivent une victimisation plus grave (Archer 2000).

Kimmel (2002), Felson et Cares (2005), Johnson (2008) et Allen (2011) offrent quelques explications concernant les résultats contradictoires des différentes études. Les grandes différences s’expliquent par les divers types d’enquêtes auxquelles on a recours dans le cadre de ces études empiriques : le nombre d’actes de violence divulgués et la gravité de ceux-ci dépendent énormément des questions qui sont posées (définitions), des hypothèses et des échantillons. Il y a deux types principaux d’enquête sur la violence conjugale : les enquêtes fondées sur les actes criminels signalés aux services de police et les enquêtes fondées sur les déclarations faites par les victimes elles-mêmes, c’est-à-dire sur la Conflict Tactics Scale (CTS).

Les enquêtes fondées sur les actes criminels signalés à la police incluent seulement les incidents portés à l’attention des services de police (le programme DUC2 au Canada) et à l’égard desquels on juge qu’un crime a été commis, ce qui signifie que seuls les incidents où un acte posé correspond à une infraction prévue par le Code criminel sont inclus. Dans le cadre des études fondées sur les actes criminels signalés à la police, on conclut invariablement que les femmes sont plus souvent victimes d’actes de violence que les hommes (Kimmel 2002). Par contre, dans le cadre des enquêtes fondées sur les déclarations des victimes et donc sur la CTS (l’ESG au Canada), on prend des échantillons de la population en général, et on fait souvent état de taux de victimisation équivalents chez les hommes et chez les femmes. Ce type d’étude est plus général, et il porte tant sur les actes de violence d’une importance moindre que sur les incidents graves. Il y a aussi des enquêtes axées sur les refuges [l’Enquête sur les maisons d’hébergement (EMH) au Canada]. Les enquêtes de ce type présentent des résultats semblables, sur le plan de la prévalence et de la gravité, aux enquêtes fondées sur les crimes signalés au service de police, c’est-à-dire que ce sont surtout des femmes qui sont victimes. Il est important de signaler que beaucoup de refuges sont réservés aux femmes et que les résultats ne sont donc pas représentatifs de l’ensemble de la population (Statistique Canada 2009).

Certains chercheurs affirment que les actes de violence dont il est question dans les enquêtes fondées sur la CTS sont sortis de leur contexte et que la symétrie entre les sexes sur le plan de la violence entre partenaires intimes (VPI) est donc trompeuse. Allen (2011) explique que les principaux types d’enquêtes brossent des tableaux différents de la VPI parce qu’ils portent en fait sur des types différents de VPI. Il est possible de résoudre la contradiction manifeste dans les résultats de différents types d’enquêtes en subdivisant la VPI en deux catégories : le terrorisme intime (TI) et la violence conjugale courante (VCC). Il y a TI lorsqu’un conjoint recourt à une violence marquée pour exercer une emprise et une domination sur l’autre, tandis qu’on parle de VCC lorsque ce sont surtout des actes de violence de moindre importance qui sont posés lorsque les conflits caractéristiques de bien des relations surviennent. Graham-Kevan et Archer (2003) présentent des données empiriques qui montrent que la distinction entre le TI et la VCC permet effectivement de résoudre la contradiction entre les conclusions des différents types d’enquêtes. À partir d’une enquête fondée sur la CTS, ils concluent que 87 % des actes de TI sont perpétrés par des hommes et que 55 % des actes de VCC le sont par des femmes.

Dans le cadre du présent rapport, les coûts sont présentés en fonction du sexe de la victime, dans le but d’examiner les différences entre les sexes en ce qui a trait à la victimisation relative à la violence conjugale. Les données utilisées proviennent de l’enquête fondée sur les actes criminels signalés aux services de police du Canada et de l’enquête fondée sur les déclarations des victimes, selon le cas.

1.3 Le coût de la criminalité

L’examen de l’incidence économique de phénomènes sociaux est une démarche établie dans le domaine de la recherche en sciences sociales, et il y a eu beaucoup de travail visant la mise au point de méthodes d’estimation des coûts dans le domaine au cours des dernières décennies (Cohen 2005). En particulier, la criminalité a retenu l’attention des décideurs et des chercheurs qui ont mené des études sur l’incidence économique de ce phénomène. Il y a une minorité qui n’est pas d’accord avec l’idée que l’établissement du coût de la criminalité est une méthode efficace et une démarche qui vaut la peine d’être suivie (Zimring et Hawkins 1995), mais les gens qui défendent cette méthode affirment qu’il peut être important pour les décideurs de connaître l’incidence économique de la criminalité et que cette connaissance peut être utile pour affecter adéquatement les ressources au sein du système de justice pénale, ainsi qu’en fonction des différents problèmes sociaux.

La critique qui est souvent formulée concernant les démarches de nature économique, c’est qu’elles visent à attribuer une valeur monétaire à des choses invisibles. La vie d’une personne et les souffrances et douleurs subies par une victime sont des notions auxquelles ne s’attachent pas de prix déterminés par les forces économiques naturelles à la manière du prix des biens sur le marché, qui est déterminé par l’offre et la demande. Il est donc difficile d’en établir la valeur en dollars, et il y a même des gens qui affirment que le faire, c’est manquer de délicatesse. Pourtant, on peut affirmer que les avantages des démarches d’établissement des prix sont plus importants que les inconvénients potentiels et que l’estimation du coût de la criminalité permet d’obtenir de l’information qui a une utilité concrète.

Comme l’affirme Cohen (2005), le coût de la criminalité équivaut à l’avantage découlant de la réduction de la criminalité, c’est-à-dire à la somme que la société serait prête à dépenser pour empêcher un acte criminel d’être posé. Il est important de ne pas oublier que les ressources économiques sont limitées, peu importe la richesse relative d’une société. L’estimation de l’incidence économique de différents phénomènes sociaux est donc essentielle pour déterminer (par l’intermédiaire de la condition marginale) la façon efficace de répartir les ressources entre les différents programmes qui doivent être financés à l’aide des deniers publics (p. ex. une augmentation des effectifs policiers, l’augmentation de la capacité dans le domaine des soins de santé, une nouvelle infrastructure de transport ou de nouveaux parcs publics).

L’élaboration de politiques suppose l’affectation de ressources publiques limitées. Les questions auxquelles doivent répondre les gouvernements qui formulent des politiques sont les suivantes :

  1. Comment faire pour répartir les fonds publics efficacement?
  2. Comment faire pour répartir les fonds publics équitablement?

La répartition efficace de l’argent suppose l’obtention de l’effet maximal de fonds limités, sans égard à l’égalité des dépenses. Si le fait de dépenser l’intégralité des fonds publics pour régler un problème permet d’obtenir dans l’ensemble des retombées plus importantes que si l’on affectait même une petite partie des fonds à une autre initiative, le principe d’efficacité dicterait le choix de la première solution. Cela pourrait toutefois être considéré comme étant injuste, et il peut être souhaitable d’utiliser au moins une partie des fonds pour tenter de régler chacun des problèmes qui se posent. Il y a souvent une tension entre les orientations que supposent les deux questions ci-dessus, et il s’agit de trouver un équilibre entre l’efficacité et l’équité.

Les estimations de coût aident à répondre à ces deux questions. L’argent peut être vu comme étant l’unité universelle et objective, et le fait d’attribuer une valeur monétaire objective à des choses subjectives et abstraites comme les effets sur la santé mentale ou les souffrances et douleurs subies est une façon de normaliser des problèmes sociaux qui sont en concurrence et de permettre une comparaison directe entre ceux-ci. Les démarches d’établissement des coûts comportent toujours de nombreuses difficultés, et celles qui se sont posées dans ce cas-ci sont décrites dans la section suivante, qui porte sur la méthode utilisée.

Plusieurs initiatives d’établissement des coûts de la victimisation ont été menées au Canada, mais peu d’entre elles portaient précisément sur la violence conjugale. La présente étude vise à combler cette lacune dans nos connaissances et servira de ressource à tous les intervenants qui travaillent ensemble pour mettre fin à la violence conjugale et pour venir en aide aux victimes, à leurs enfants et aux nombreuses autres personnes touchées.

Le tableau 1.1 présente les travaux antérieurs d’établissement du coût de la violence conjugale, de la violence entre partenaires intimes et de la violence faite aux femmes au Canada. Walby (2004) et Varcoe et coll. (2011) font une revue détaillée des études sur la violence conjugale réalisées dans le monde en 2010 ou avant.

Tableau 1.1 : Études visant à établir le coût de la violence conjugale et de la violence entre partenaires intimes au Canada
Authors Description Résultat Résultat (2009 $)Note de tableau
Day (1995) Estimation du coût économique lié à la santé de la violence faite aux femmes au Canada (frais médicaux, perte de temps de travail, maisons d’hébergement, etc.) 1,54 G$ (1993) 2,05 G$
Greaves et coll. (1995) Estimation du coût économique de l’agression sexuelle, de la violence entre partenaires intimes et de la violence sexuelle faite aux enfants et aux femmes au Canada sur les plans de la santé, de la justice pénale, des services sociaux/de l’éducation et du travail/de l’emploi 4,23 G$ (1994) 5,55 G$
Kerr et McLean (1996) Estimation du coût économique et de la violence faite aux femmes en Colombie-Britannique dans les domaines comme les services de police, les services correctionnels, l’aide au revenu, la perte de temps de travail, les maisons d’hébergement, etc. 385 M$ (1994/1995) 502 M$
Varcoe et coll. (2011) Estimation du coût de la violence entre partenaires intimes pour les femmes qui quittent un partenaire violent 6,9 G$ (2011) 6,62 G$